Le calame, pour une écriture sensible

Le calame, pour une écriture sensible

Éclipse



Une caresse invisible frôle ma joue.  Il ne m’en faut pas plus pour que je m’éclipse de la fadaise quotidienne. Je suis émue.  Et cette émotion agréable monte en moi et me rend aussi légère que plume au vent.  Je flotte dans l’air, suspendue entre ciel et terre. Mon corps ondule comme une vague aérienne dans l’espace infini qui m’entoure. J’exécute quelques prouesses acrobatiques dans l’infinitude du ciel qui, magnanime, me protège. Deux ou trois nuages aux ventres blancs gonflés et bien ronds se déplacent encouragés par une douce brise matinale chaude et réconfortante.  Ils se pavanent, s’effilochent, se reconstruisent autrement et changent constamment d’apparence.  Fascinée, je contemple leur versatile beauté éphémère et irréprochable. Je m’amuse au cœur d’un ciel aimant et fabuleux.  Mon imagination exaltée s’occupe de tout.

 

Je me déplace d’une galaxie à l’autre et les étoiles me portent sur leurs étincellements.  Je danse sur leur brillance qui me guide et crée au fur et à mesure une chorégraphie grisante qui se réinvente à chaque instant.  Les perséides viennent soupoudrer leur éclat ininterrompu devant mes yeux médusés par leurs déplacements beaucoup trop rapides, même pour un œil averti.  Leurs lumières tourbillonnantes se répandent dans le vide qui se remplit de leur présence. Elles dessinent des trajectoires inédites, des figures éblouissantes d’une rare virtuosité.  Je continue de danser.  Mes sauts délurés d’une étoile fixe à l’autre séduisent l’esprit du vent.  Mon âme se délecte de ce bonheur simple que trop souvent seuls les anges comprennent et apprécient. 

 

 

Je vais loin, de plus en plus loin, dans les profondeurs abyssales du ciel violacé.

Il m’arrive même de quitter notre système solaire tandis que je dérive à travers les trous noirs aux frontières des univers.  J’en ressors avec l’impression diffuse d’être allée un peu trop à l’écart des mondes mais où au juste ?  Ça, je ne saurais le dire vraiment. Ce sont des endroits silencieux dont on ressort sans souvenir. Enfin, je poursuis ma route sans trop m’attarder à penser à ce qui ne se pense pas !

 

Je continue mon voyage improbable.  J’assume ma différence.

 

Comme un ouragan spatial fait pleuvoir des électrons, mes pensées explosent et des millions de fragments de joie se répandent dans tout mon univers.

 

Cela me donne envie de danser encore et encore sur les constellations : petits pas de deux sur celle du Bélier, sauts en hauteur droit devant sur les pléiades, grand écart sur celle du Lion et sublime portée grâce à un ange qui passe par-là sur la constellation du sagittaire ! Une musique inédite de flute et de harpe m’énergise tandis que je sautille maintenant sur des notes claires d’une rare netteté.  On peut y entendre les pulsations rythmées de l’univers comme un cœur qui bat, une omniprésence de potentialités de vies.  Ce vagabondage innocent est un pur délice.

Je me glisse furtivement et descends lentement une à une, les sept couches de l’atmosphère.  Je dessine des cercles autour des avions et des hélicoptères avec la puissance de l’aigle et la grâce de la colombe. Pour compléter mon périple amoureux, je m’élance vers le jeu des oiseaux à plus basse altitude et je me laisse porter comme eux par les courants venteux, pluvieux ou plus subtils.  Enfin, je touche le sol presque malgré moi.  Je me sens encore fluide comme si rien de stable ne pouvait me retenir.  Je prends le temps qu’il faut pour me poser, convaincue plus que jamais de la Beauté du monde, en fait, de tous les mondes. La terre, ma planète natale m’ouvre ses bras et je me cale affectueusement dans ses replis rassurants. 

 



08/05/2021
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